dimanche 3 avril 2011

Face à la mort

La mort, seule fatalité à laquelle on ne peut échapper, est capable de transformer les gens qui restent, ou resteront, en bêtes féroces et imprévisibles.

Si certaines personnes vivent normalement la tristesse, de façon civilisée, posée et avec respect, d’autres y voient une opportunité en or pour semer la pagaille, pour injecter dans le cœur des gens tristes, en plus de leur deuil, de la frustration et de la haine.

Certaines familles semblent prédisposées à ce genre d’événements. Les familles nombreuses, dont les membres sont majoritairement baby-boomers, sont spécialement sujettes à l’éclatement de conflits en périodes de deuil.

Alors que certains prennent des décisions difficiles et souffrent, pour le bien des personnes concernées, les autres creusent un trou bien profond dans le sable pour s’y enfoncer la tête le plus profondément possible et, du même coup éviter tout contact avec ladite prise de décision.

Il y en a, pour qui la prise de décision étant une activité très douloureuse, le fait que les autres décident pour eux est une source de réconfort, puisqu’ils savent qu’ils sont inaptes à le faire. Ceux-là, dans toutes les sphères de leur vie, souffrent de quelconquisme, maladie qui fait d’eux des personnes quelconques, faciles à oublier et effacées.

Cependant, il y a l’autre type de personne. Celui-là, le pire, regroupe des gens trouillards, refoulés et à la répartie tardive. Il nous est tous arrivé de faire face à une situation et d’y repenser, avec du recul, en se disant qu’on aurait bien dû dire ou faire telle ou telle chose. Eux, quand ils y repensent, avec le temps, ils s’inventent de l’intelligence et disent et font les telles ou telles choses en question. Mais c’est comme d’expliquer une blague, ça ne se fait pas.

Le problème, c’est qu’il est bien trop tard. Un exemple pour simplifier cet amas de mots? Prenez par exemple une grand-mère mourante qu’on aurait récemment « placée » dans un foyer, contre son gré, parce que son état de santé était devenu une menace pour elle et pour son environnement immédiat.

Supposons, tant qu’à supposer, que cette grand-mère soit, en plus d’être malade, insupportable et méchante avec les gens en général. Puisqu’elle est difficile et têtue, ses enfants hésitent à faire le saut, à prendre le chemin qu’il faut, jusqu’à ce qu’un d’entre eux, aidé d’une de ses sœurs, plonge. Certaines rechignent, pendant que d’autres sont enfoncés dans leur trou, mais le fait est que la décision est prise.

Quelques semaines plus tard, la grand-mère, toujours insupportable, de plus en plus difficile et méchante, comme si c’était possible, commence à mourir. Ah! Son autre fille, celle qui n’avait pas daigné levé ne serait-ce qu’un sourcil lorsqu’il le fallait, trop occupée à être elle-même, s’allume telle une ampoule fluocompacte, doucement au début, puis d’un coup sec.

Et là, comme si elle avait des choses à se reprocher, comme si elle réalisait qu’il lui reste peu de temps pour accomplir quelque chose pour sa mère, peu de temps pour pouvoir dire, dans un futur quelconque, qu’elle aura fait quelque chose. Un peu paniquée, ou stressée, ou blessée dans son orgueil, je ne saurais le dire, elle conteste, dès que l’allumage est complété, les décisions qui ont été prises pendant qu’elle vaquait stupidement à sa vie.

Comment se faisait-il qu’on ne lui eût JAMAIS demandé son avis? Placer sa mère était une décision stupide, elle s’en serait occupée, elle! AHAHAHAHAH!!! Quel meilleur moyen qu’un réseau social tel que Facebook pour contacter tous les petits enfants afin de les tenir au courant de la situation, et de leur offrir gracieusement un peu de culpabilité (qu’elle est généreuse), en leur disant que ça lui ferait tellement plaisir (à la grand-mère) si ceux-ci lui rendaient visite une dernière fois!

Je suis curieuse de savoir s’il est réellement possible de transférer des remords sur les autres, en se soulageant réellement, ou si le résultat n’est pas plutôt épidémique, c’est-à-dire que personne n’est soulagé, mais que plus de gens souffrent.

Toujours est-il que, il est légitime de se demander combien de gens elle aura réussi à infecter, de la cousine qui s’est fait traiter de lesbienne par ladite grand-mère à la tante qu’elle a toujours traitée de « guidoune », en passant par moi, qu’elle n’a jamais acceptée dans la famille, faute de preuves. Oups… C’était censé être hypothétique.

Ma réaction, en consultant ma page Facebook n’a pas été « Oh non! Grand-maman meurt! » mais plutôt : « Voyons, elle est conne celle-là de mettre ça sur Facebook. » Chacun son point de vue, je suppose.

Quand on lui reprochera d’avoir été conne, d’avoir été méchante et réactive plutôt qu’aimante et proactive, elle pourra toujours faire comme tant de gens le font, et mettre tout cela sur le dos de la tristesse. Être triste, c’est comme être vieux, on peut tout se permettre, et il suffit de s’excuser ensuite, sous prétexte qu’on est vieux ou triste.

2 commentaires:

  1. OUCH! Bon texte!

    Et... désolé?... pour quelle chose, c'est flou... mais désolé que tu vives une situation de même.

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  2. Non, ça va, ça se déroule très loin de moi, c'est seulement que ça touche des gens proches.

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