jeudi 28 juillet 2011

Choisir ses combats

Avoir un enfant, que ce soit par choix ou par surprise, chose que je ne comprendrai jamais, est une entreprise qui demande une implication totale et entière. Chaque journée est une nouvelle aventure et dès qu’on a l’impression d’avoir acquis une certaine stabilité, on se rend compte que la vie de famille est sans doute un des sols les plus instables que la vie sur terre ait connu. Marcher sur l’eau est bien plus prévisible qu’avoir un enfant. Au moins, on sait qu’on coulera.

Avant d’être mère, ma seule perception des enfants était celle que j’avais quand je sortais au centre commercial ou dans les fêtes de famille où, on s’entendra sur ce point, ils ne sont jamais vraiment pas à leur meilleur. Je suis enfant unique et je ne fréquente pas ma famille, et mes amis n’avaient pas d’enfants. J’avais bien certainement une opinion à propos de tout, et j’affirmais avec certitude que je ne laisserais jamais mon enfant me taper en pleine face ou faire une crise en public, car personne de mentalement sain ne désire de telles situations, mais sinon, j’avais beau avoir un minimum de vécu, je n’en savais fichtrement rien.

Le temps a passé, les choses ont changé. Maintenant, je suis mère d’un seul être humain, un petit garçon. Il a deux ans. Je sais beaucoup de choses. On m’a souvent dit que mon fils était un bébé facile. Ces gens avaient raison. Il a pleuré pendant ses trois premières semaines de vie, puis a arrêté. Mon allaitement s’est bien déroulé. Il a fait ses nuits assez tôt, vers quatre mois, peut-être avant. Il a bien mangé, s’est bien intégré à la garderie, a marché avant d’avoir un an, a parlé tôt, et bien, et s’est toujours couché aisément, sans crise, sans drame. Il a été peu malade, ne faisait pas de crises. Un enfant facile.

Vers un an et neuf mois, vingt et un mois comme disent la plupart des parents, il s’est mis à s’affirmer. Le « terrible two », m’a-t-on dit. La discipline, qui était toujours allée de soi, que ce soit pour le coucher, les interdictions, les mises à niveau, est devenu un genre de combat. Puis, il y a eu certains bouleversements, dont la fermeture impromptue de la garderie, la propreté récemment acquise et sa nouvelle capacité d’exister à plus grande échelle.

Comme lui, sans doute, nous avons été pris par surprise, ne sachant pas vraiment comment réagir. Sans le faire exprès, nous nous sommes mis à appliquer la devise « choisir nos combats ». Cette idéologie était pleine de sens, puisque sans cela, nous aurions passé la totalité de nos moments en famille à nous chicaner, à mettre le pauvre Matus en punition et à dire « non » à chacune de ses actions, puisqu’elles étaient presque toutes répréhensibles.

Après quelques semaines de cette pratique, alors que ma santé mentale commençait à battre de l’aile et que notre fils semblait de pire en pire, nous avons dû changer notre fusil d’épaule, il fallait trouver une solution, notre fils était en train de devenir un monstre. Tapes dans la figure, crise de « bacon », monsieur mou, « garrochage » d’objets, automutilation légère, il faisait tout, sans compter la manipulation avec l’« envie de pipi », qui était abusive de par sa fausseté. Qui peut bien avoir besoin d’urine quinze fois dans sa première heure de « dodo »?

Nous avions « choisi nos combats », et nous avions échoué. Nous devions alors vite établir un plan B. Ne rien tolérer. Advienne que pourrait, notre fils ne serait pas le maître de la maison, et il était hors de question que j’aie à avoir honte en public.

Maintenant, dès qu’il fait une action interdite, la riposte est immédiate. Savez-vous quoi? C’est difficile. Ça gruge du temps, et de l’énergie. Pire encore, il faut parfois annuler des choses qui nous tiennent à cœur pour être conséquents dans nos actions, pour qu’il réalise que les actions ont des conséquences. Ça marche. En moins d’une semaine, les résultats sont surprenants.

Il n’est pas redevenu le bébé facile qu’il a été, puisqu’il n’est plus un bébé, mais nous voyons très bien dans ses yeux, quand il « s’essaie », qu’il comprend la signification de nos gros yeux. Il sait quand il fait quelque chose de « mal », il hésite lorsqu’il pose l’action. Après une punition, il est plus calme, plus gentil, sauf quand il manque sérieusement de sommeil, dans ce cas, rien n’y fait.

Maintenir ce rythme quand les vacances seront finies sera dur, prenant, mais je sens que cette démarche est nécessaire pour faire de notre petit homme un enfant vivable. Il est intelligent, mieux vaut ne pas tout gâcher. Après coup, je n’ai qu’une chose à dire : Choisir ses combats? Non, pas vraiment. Les enfants méritent qu’on se batte pour eux, même si ce doit être avec eux.

1 commentaire:

  1. J'ai bien aimé ton récit et aussi étrange que celui puisse paraître, je me suis rappelé moi-même la période que j'ai vécu comme père.

    Ce n'est pas facile d'être parent. Surtout quand on l'est pour la première fois. Il n'y a pas de mode d'emploi pour savoir éduquer un enfant. Son enfant.

    C'est l'expérience qui « rentre » et les décisions qu'on doit prendre ne sont pas faciles. Je suis père de deux trois enfants dont deux d'entre eux ont des handicaps intellectuels.

    Ils en ont bavés longtemps (j'ai rédigé un texte qui sera publié le 1er et le 3 août prochain les concernant) et nous aussi. Nous sommes passés, leur mère et moi par toutes les gammes d'émotions possibles.

    Ton enfant est dans l'âge de manipuler pour obtenir ce qu'il veut et il fera tout pour avoir gain de cause. Vous avez bien réagi en disant le mot clé : Non ! Un non ferme et autoritaire.

    Votre fils va continuer de grandir et ses méthodes pour avoir ce qu'il veut vont changer aussi. Petite anecdote : mon fils ainé est asthmatique. Il faisait des crises plus souvent quand il était plus jeune.

    Il réussissait à obtenir tout (ou presque) ce qu'il voulait en déclenchant des crises d'asthme. Bien sûr, ça paraissait réel mais en réalité, c'était sa manière à lui de nous manipuler.

    Il nous avait possédé pendant quelques temps et lorsque sa mère s'en est rendue compte et qu'elle a mis un frein à ses fausses crises, tout est rentré dans l'ordre. Heureusement que sa psy nous avait aidé !

    Bon courage Emia ! ;))

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