mercredi 19 septembre 2012

Face à la mort


Les gens meurent, c’est bien connu. Pourtant, chaque fois que la mort d’un proche frappe, je saisis. Il est vrai que la mort est un passage oblige qui mène vers l’inconnu, ou rien selon les croyances personnelles de chacun, mais il demeure intéressant de constater à quel point ce phénomène est déstabilisant, du moins pour moi.

J’ai un problème avec la mort, puisque je ne sais pas où ça mène, mais là où le malaise est plus grand, c’est que j’ai vraiment du mal à saisir la convention sociale autour de la mort dans notre culture. Ou encore, je la saisis tout à fait et je la trouve inadéquate. Poche serait aussi un terme acceptable. Préférable même.

Je ne comprends pas pourquoi on s’acharne à maintenir les gens beaux alors qu’ils sont morts. Le mot « mort » vous choque? Loin de m’en excuser, je vous invite à lire ce billet, déjà vieux de deux ans, mais tiré de ma meilleure année. Toujours est-il que si c’était moi qui décidais ce que les gens font, une fois morts, ce serait tout simple : on les brûle, on les met dans un beau petit contenant moulé dans le métal de notre choix, on fait une petite « fête » où on oublie les mauvais côtés du défunt (mort) et ensuite, chacun vit son deuil sainement à sa manière, selon sa relation avec la mort et avec le mort. Pas de niaisage de le mettre dans le frigo, de le vider, de le re-remplir, de le maquiller comme on peut et de l’exposer.

Chaque fois dans ma carrière de visiteuse de salon funéraire, j’ai été traumatisée par le mort. Non, il ne se ressemble jamais. Il a le teint gris ou jaune, les joues renfoncées et les lèvres cireuses. Je ne critique en rien les embaumeurs, c’est tout le principe qui me déstabilise. Je préférerais seulement me souvenir du mort à l’époque où ladite mort n’était qu’à l’état de projet.

Nous avons un nouveau mort dans la famille. C’est tout récent et je suis sous le choc. C’était l’oncle de mon chum et nous avions travaillé ensemble un été entier, il y a dix ans. C’était un passionné de plein air, chasse et pêche. Il aimait Chibougamau, c’est bien pour dire. Un jour il a eu mal au ventre, mais sa journée de plein air ne pouvait attendre. Il s’est avéré plus tard qu’après une suite d’événements, il est mort.

Tout à l’heure, je l’ai trouvé con d’avoir ignoré sa santé pour faire quelque chose qui pouvait attendre. On sait tous, maintenant, que « S’il avait… » (c’est déjà trop tard). Après avoir fait mijoter la réflexion, je réalise qu’au fond, la simple idée pour lui de rester immobile à la maison représentait une sorte de mort. Alors il a vécu fidèlement à lui-même, et ce jusqu’au bout.

La famille de mon chum, c’est ma famille. J’ai de la peine. L’idée de savoir qu’il est mort « heureux » ne diminue pas cette peine. Par contre, le simple fait d’avoir relativisé ce que je lui « reprochais » m’a apaisée. C’était ma réalité à moi, de préférer ma santé au reste. La sienne était différente, et personne ne peut dire qui avait raison. Heureusement, il avait choisi ce qui se rapproche le plus de ma vision de la mort. Je pourrai admirer son urne. L’image dans ma tête sera belle et ne me rappellera pas sa mort.

Finalement, je n’ai pas écrit ce billet dans le but d’avoir une tonne de condoléances ni de réconfort. C’est quand même assez loin de moi pour bien aller. Et n’allez pas croire que ce texte se veut un avis de décès (fiche de mort?). Ce n’est qu’une façon pour moi de vous partager mon malaise face à la mort.

1 commentaire:

  1. Je ne sais toujours pas comment me comporter lors de funérailles. Je ne vais pas aux funérailles dans ma famille.

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