dimanche 1 mars 2020

Un an sobre, pis après?

Le premier mars 2020, soit aujourd’hui, célèbre une année complète, plus un jour, sans consommation d’alcool, sauf le millilitre de vanille que j’ai mis dans mon lait, quelque part en 2019. Cette aventure a commencé avec un “dry March”, ou mars sec (ça fait bizarre). Pourquoi pas février, comme tout le monde? En janvier, je n’étais pas prête, en février j’y pensais, et de toute façon, je NE SUIS PAS tout le monde. Pas question que je me contente du mois le plus court, tsé.


Mais au fait, pourquoi faire un mois “sec” de toute façon? Suis-je alcoolique? Ai-je un problème? Qui suis-je? Où vais-je? Que veux-je? On s’écarte du sujet. Mais la question est pertinente. Suis-je alcoolique? Ai-je un problème? La réponse n’est pas aussi simple que oui ou non.


Qu’est-ce que l’alcoolisme? Selon les sources, la définition varie. Et selon ce site web (https://www.alcoholrehabguide.org/alcohol/), je ne le suis pas du tout. En fait, leur définition est tellement intense que même les plus alcoolos que je connais ne s’y reconnaîtrait pas. Selon cet autre site (https://www.helpguide.org/articles/addictions/alcoholism-and-alcohol-abuse.htm, je peux me reconnaître (reportons-nous il y a un an) dans plusieurs points de la liste concernant un problèeme de consommation :
  • Me sentir honteux ou coupable de ma consommation. Eh oui, malgré un comportement “pas si pire”, je me suis réellement sentie comme de la merde souvent…
  • Mentir aux autres ou me cacher pour boire. Non. Je ne suis pas menteuse.
  • Ressentir le besoin de boire pour relaxer ou me sentir mieux. Tout à faire. J’y reviendrai en détails plus loin.
  • Oublier mes soirées arrosées ou avoir des “blackout”. Non, quand même pas!
  • Boire régulièrement plus que “prévu”. Eh oui. Et surtout plus souvent.


Ceci étant dit, il y a beaucoup beaucoup plus de gens qui consomment beaucoup plus et plus souvent que je le faisais, et ne considéraient donc pas du tout ma consommation comme étant problématique. Tant mieux pour eux. Cependant, je ne me compare pas aux autres, mais à mes propres standards et objectifs (le besoin social des gens à encourager les autres à boire pour minimiser leur propre culpabilité sera abordé plus loin).


Or donc, les dernières années n’ont pas été faciles du point de vue professionnel, mes emplois ne me convenaient pas. Quand la fin de semaine arrivait, je ressentais une sorte d’euphorie à l’idée d’enfouir ce vide intérieur, cet état de déprime et d’anxiété, sous quelques bières… une ou deux, ou trois ou quatre. Ou une bouteille de vin. Ou les deux. Je n’ai jamais bien toléré l’alcool en quantité, et les antidépresseurs (qui traitent aussi l’anxiété) n’aident absolument pas la chose. Je buvais donc dès l’arrivée du travail le vendredi lorsque les enfants étaient chez leur père, et samedi dès l’après-midi, et dimanche aussi. Et parfois le lundi lorsque la journée était vraiment merdique. Et les lundis tendaient généralement à être la pire journée de la semaine. Il m’a fallu beaucoup de temps pour verbaliser mon malaise envers ma consommation. Et encore plus à le verbaliser à d’autres humains que moi-même, pour ensuite “prendre un mois off”.


Au début, j’ai beaucoup adouci les raisons du pourquoi, premièrement parce que je ne me connaissais pas aussi bien que maintenant, et la vérité me faisait mal. Certains voulaient savoir avec une insistance presque malsaine, comme si ça accentuait leurs propres problèmes. Au final, j’ai dit que ça nuisait à ma médication, ce qui n’était pas faux, et que ça générait des crises d’anxiété nocturnes post-consommation, même à petite dose, ce qui n’était pas faux non plus. Tout ça sans jamais mentionner le vrai pourquoi : Je me détestais lorsque j’étais sous l’influence de l’alcool, même juste un peu. Rien que ça. Même à jeun, je suranalyse chaque mot qui sort de ma bouche, et je vous jure que je suis volubile. Une fois pompette, c’était 100 fois pire, et ça pouvait durer des jours, le cerveau en mode missile à tête chercheuse pour trouver toute trace de culpabilité possible.


Je détestais l’espèce d’image que je projetais de fille accessible et amicale, un peu colleuse (j’exagère un peu) alors qu’en fait, je suis légèrement agoraphobe, je déteste sortir de mon cocon, me faire toucher, et je n’aime pas particulièrement les gens, en général. Alors j’ai arrêté. Comme ça. Comme pour le sucre, comme pour les cosmétiques, mon mariage, ma carrière d’ingénieure. Et ce fut un nouveau départ. Incroyable, non?


Le premier jour, à un spectacle du groupe de mon chum, je me suis complètement désorganisée, je me suis fâchée, en panique, parce que les choses n’étaient pas comme je l’avais prévu, et je me suis retrouvée seule, dans une foule, dans un endroit inconnu. Ceci a mené à une super chicane, que j’ai justifiée de toute sortes de façons, toutes plus crédibles les unes que les autres, et la vie a suivi son cours.


Peu à peu, j’ai perdu ma capacité à sortir pour voir des gens. Pire encore, mon intérêt à sortir et à voir des gens s’est dissipé, sauf pour certains amis proches. J’ai arrêté d’avoir du plaisir avec “les gens”. S’en sont suivies plus de questions que de réponses. Plus tard cette année-là, après de longs efforts pour trouver ce qui n’allait pas avec moi, j’ai appris que j’étais autiste de haut niveau (asperger), et c’est là que tout s’est comme expliqué. 


Je me cachais derrière l’alcool pour m’intégrer et me calmer dans les foules (si petites soient-elles), et pour arriver à discuter sans être étrange (vraiment bizz). Donc, pas d’alcool, pas de fun. Non mais, c’est dans le pathétique… Aussi bien recommencer à boire à voir combien cela m’a isolée, non? Non. Je me suis mise à détester l’alcool, toute la publicité, la gloire, le chic, et donc, j’ai évité de prendre des bains de foules de gens saouls. J’y vais encore parfois, quand il faut, et que j’ai une sortie de secours, et je survis chaque fois, mentalement. Je ne m’amuse cependant jamais vraiment, sauf si une chanson que j’aime et que je connais est jouée, ou qu’on me parle d’un sujet qui m’intéresse, comme les animaux ou l’environnement.


Un fait intéressant appris de cette année sobre? Les buveurs n’aiment pas être entourés de gens sobres. Ils n’arrivent pas à piger pourquoi ils ne boivent pas. L’espèce de refus de voir quelqu’un sans un verre à la main. Je me demande si c’est leur propre incapacité de s’amuser sans alcool ou s’ils ont peur de ce qu’ils peuvent laisser échapper… Si vous savez, dites-moi!


Le futur est prometteur pour moi. 2019 a été une année d’exploration et de découvertes, certaines douloureuses, d’autres belles. À ce jour, je sais que je n’ai pas besoin d’alcool dans ma vie. Les gens peuvent encore boire chez moi. Mais je les vois changer, un genre de point tournant après quelques verres, et ça devient “mou”. Je tolère la version ramollie de la plupart des gens que j’apprécie. Je n’embrasse plus mon chum quand il a bu parce que son odeur me dégoûte, mais je ne lui demanderai jamais de s’en empêcher parce que sa relation est saine, en supposant que ça existe. Je sors moins, je crée plus, je m’épanouis. Santé à ce futur sobre!

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