mardi 17 mai 2011

Bisou...

Ce matin, alors que j’allais donner le bisou de départ à mon petit Bisou, avant que son père aille le reconduire à la garderie, j’ai figé, le regard plongé dans ses yeux rieurs et pleins de vie. Il souriait, la bouche entrouverte, et me racontait toutes sortes de péripéties, dont je ne saisissais que la moitié. À cet instant, j’ai eu comme un coup de poignard en plein cœur.

La douleur n’a pas atteint mon organe de vie, mon cœur qui bat, celui qui s’occupe de distribuer mon sang, mais bien mon cœur de mère. Ce cœur que je n’avais jamais ressenti avant, que j’avais une peur bleue de ne pas avoir, ce cœur qui m’a transformée. Mon cœur de mère a su me faire réaliser que je suis en train de rater ma maternité au profit de ma carrière.

Je prévoyais détester mon travail et finir par travailler à la maison, pour être avec mon fils plus souvent. Malheureusement, ou heureusement, c’est selon, j’aime mon travail. Par contre, mon travail fait que je ne vois mon Bisou que trois petites heures par jour, et pas dans le meilleur. La course du matin, la course du souper et du bain, que je manque au profit de la vaisselle, et finalement, on se colle le temps qu’il boive son « gros gros lait jaune » (son gobelet est jaune) avec sa bavette de « bobobus » (ces temps-ci, il aime les autobus).

Au moins, la fin de semaine, je ne sors que très peu, et presque exclusivement quand il dort, pour faire des activités aussi palpitantes que l’épicerie et du magasinage ennuyant. Puis la fin de semaine, il a le droit de regarder des films. Ces jours-ci, c’est « Mimo le poisson » (Nemo) avec « Pruce le brequin » et « Doyis le poisson bleu » et aussi le « torzozeuille » (raton laveur) et le « kicuyeuille » (écureuil) de « Over the Edge » (Nos voisins les hommes). Il était réticent au départ mais on l’a mis en catimini et le résultat l’a enchanté.

Puisqu’on aborde sans le vouloir le sujet du langage des petits amis, je dois vous avouer que deux ans (dans trois semaines), c’est un âge tout à fait charmant. Ses phrases télégraphiques sont devenues bien plus soutenues et il fait des associations surprenantes. Si le cri de la girafe est « Papillon papillon » et celui du chien est « Papus » (son nom également), celui du raton laveur est plus exotique. Il pousse le vide devant lui, des deux bras, en disant « heinnnn ». Ce soir, après que je lui ai donné une tomate cerise, il a dit, étonné : « Un bébé tognaque! ». Je cherche encore pourquoi il a troqué tous ces « t » de fins de mots pour des « k ». « Bibique », « mammouque », « louque » (loutre). Et il dit « soute » pour soupe.

Comme je le mentionnais, les heures passées avec lui ne sont pas toujours ses meilleures de la journée, et les crises sont de plus en plus nombreuses. Il nous teste, cherche les limites. Hier d’ailleurs, il a fait une crise assez costaude (j’adore ce mot, surtout lorsqu’il qualifie une femme aux proportions dérangeantes), tellement que je l’ai gentiment reconduit dans son lit. Une fois la crise terminée, il est venu me toucher la cuisse en me disant « Ai fini de pleurer Maman ». Si ce n’est pas le sommet du mignon, c’est quoi?

Finalement, pour conclure sur ma profonde douleur de ce matin, j’y réfléchis assez régulièrement et je finis par me consoler en me disant que, quand je suis là, la fin de semaine, les soirs, je suis vraiment là. Je ne cherche pas à l’envoyer se faire garder à tous les vendredis, ou samedis, à m’en débarrasser, et même si nos activités sont souvent ennuyeuses, il sait que nous l’aimons. Ça fait toujours mal, mais parfois, ça me convainc que je ne suis pas complètement fautive.

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