dimanche 19 novembre 2017

Surdouée

C’est drôle parce qu’autant ai-je longtemps été apte à écrire que maintenant, tout semble ardu. Commencer un texte, construire un texte, développer un texte. On dirait que je suis incapable de mettre les idées en forme. C’est comme si chaque fois que je me retrouve devant mon écran, je me sens exactement comme quand je veux raconter un rêve qui me semblait si clair au réveil… et que plus les secondes passent, plus j’essaie de le décrire en mots, moins ça a de sens.

Pour ceux qui me connaissent, 2017 est une grosse année. En plus de mon remplacement d’un collègue qui m’a emmenée en Chine deux fois, ma séparation, qui se transforme tranquillement en divorce, mon déménagement, mon changement de département au travail, mon changement de voiture, d’institution financière, l’arrêt du sucre, ma guitare, mon nouveau chum…  il y a la découverte de moi-même.

J’ai souvent pensé que j’étais folle, ou stupide, ou mésadaptée… je n’arrivais pas vraiment à l’expliquer, un peu comme rêve. Maintenant, un ami de quelques années, avec qui j’ai des affinités surprenantes, m’a fait découvrir tout un tas de trucs à mon sujet. Ben oui, par personne semblable et interposée.

L’homme en question pense trop, ben trop. Il n’arrête jamais. Il se remet en question 3600 fois à l’heure. Les gens le perçoivent tout de travers, comme un narcissique sans merci, un peu comme ils le font avec moi, mais avec des options différentes. À force de se parler de tout et de rien, mais surtout de tout, il a fini par me pondre qu’il est un humain à haut potentiel, un surdoué. Bon, j’avoue qu’il torche, mais le terme est fort, non?

Je fais « bah voyons tsé, moi je suis vraiment pas surdouée. Je suis plus souvent conne que wow ». J’ai fini mon bacc comme j’ai pu et je ne suis pas particulièrement brillante, surtout dans les domaines qui m’emmerdent. À force de le laisser me garrocher des articles dans les dents, j’ai fini par comprendre que le terme « surdoué » ne s’applique pas exclusivement aux enfants génies, ceux qui cassent la barraque, qui font des intégrales triples en troisième année, qui sont capable de comprendre le système politique des pays nordiques à la maternelle. Non. Un surdoué, c’est juste quelqu’un qui fonctionne différemment, et dont le cerveau n’arrête jamais, et dans lequel les associations se font en réseau plutôt qu’en série, un peu comme les lumières de Noël.

J’ai lu des choses qui m’ont bouleversée. Pas tant que je suis surdouée, parce que le terme me dérange encore, mais parce que je ne suis pas seule dans le bateau. Des choses qu’on m’a reprochées, les fois où on a dit que j’étais impolie, méprisante, incompétente, mésadaptée, bizarre. Je pensais que j’étais juste « tout croche » alors que je suis juste différente. Ouais, on est tous uniques mais entendons-nous pour dire que si le système est fait d’une façon, c’est qui est compatible avec une majorité, et je ne semble pas en faire partie. On pense.

Donc là, du coup, je me rends compte que les surdoués, ils sont en constante ébullition. Probablement qu’ils n’ont pas tous besoin, ou pas au même niveau, de faire des mots avec les plaques d’immatriculation, mais c’est certainement un « symptôme ». Et ils sont souvent hypersensibles. Sensibles aux émotions des autres, aux textures, odeurs, images… Un surdoué, ça dessine souvent quand les autres parlent. Et ça gigote. Et ça se laisse émotionnellement atteindre par les animaux, les histoires tristes, les injustices. Une chose qui m’a frappée, c’est que les surdoués, et le terme m’agace encore, ils savent les choses mais sont souvent incapables de les expliquer. Je me revois TELLEMENT en train de tenter d’expliquer les règles du français à mes pairs. « Pourquoi ça prend un e? Euh… ben voyons, c’est évident, regarde comme c’est bizarre sans e…. » Bon, ça semble épais tout ça, mais je suis partie de chez un ami récemment parce qu’il y avait une personne triste/fâchée et que j’étais incapable de ne pas le vivre pour elle. J’étais en train de me rendre malade. Si ce n’est pas de l’hypersensibilité, qu’on me pende à l’instant.

Quand j’ai lu l’article sur les humains à haut potentiel, je me suis dit « tout le monde est comme ça ». Pourtant, pas tant non. Je ne sais pas si on est plus nombreux dans certains domaines, parce que je semble entourée de plusieurs au travail. Mon ancien patron, je l’exaspérais des fois parce que je sentais quand il n’allait pas. Et je le sentais férocement. Pourtant, il le cachait, et bien. « Comment ça se fait que tu sais ça? » Je le sentais, c’est tout. Et longtemps, ça m’a fait mal de voir que les gens ne me ressentaient pas comme moi je les ressentais. Dont mon ancien patron. J’étais juste incapable de m’exprimer et j’aurais aimé qu’ils me devinent. Au fil du temps, j’ai trié mes fréquentations, plus ou moins en fonction de cet aspect de moi.

Autre fait intéressant, les surdoués ont un sens de l’humour particulier. Particulier autant dans l’émission que la réception. Je fais marrer les gens. Mais juste avec ma façon d’être on dirait. Ou ils m’haïssent pour me battre, c’est selon. Une chose difficile, c’est que tout ce qui m’est apparu ces dernières années, l’anxiété en autre, les crises de panique, c’est tout interrelié avec l’hypersensibilité et l’incapacité de m’arrêter. On m’a dit récemment que j’avais changé, qu’il y avait une « nouvelle moi ». Donc, pour être certaine que j’ai bien compris les auteurs de ces propos, l’évolution est en quelque sorte une transformation, une mutation, un cancer?

Me faire dire que j’étais une nouvelle personne, qu’on ne me reconnaissait plus, ça m’a fait chier. Pas mal, chier. Je devrai me montrer désolée pour ceux que je risque d’heurter, mais l’humain est un être d’évolution. Il apprend. On lui souhaite du moins. Si une personne reste « la même » pendant 5-10-15 ans, je devrai vous dire qu’on a un sale problème. Et je ne parle pas ici d’acquisition de connaissances techniques mais bien d’apprentissages sociaux-humains-émotionno-comportentaux. J’ai lutté pendant bien longtemps parce que je voulais être « normale ». Je voulais être « comme les autres ». Je voulais m’amuser dans les partys, m’intéresser aux futilités qui intéressent la masse, mais ça faisait juste pas.

Un jour, j’ai décidé de demander de l’aide, de consulter. J’avais besoin d’apprendre à me comporter, d’être un humain convenable. Étrangement, de toutes les choses que ma psy m’a apprises, devenir « normale » n’en fait pas partie. Elle a plutôt travaillé à me faire admettre que ces « anomalies » étaient en fait des particularités, au même titre que certaines aptitudes artistiques et sportives. Que le fait d’évoluer n’était que positif et qu’il permet de vivre avec soi-même. Si certaines personnes sont incapables de vivre avec les évolutions, les changements, c’est que la relation n’a plus de raison d’être. J’ai des amis de qui je me suis lassée. Et je me sentais exigeante et compliquée. Alors que c’est plutôt la ligne du temps qui suit son cours. Comme les dinosaures qui sont disparus. Je suis « victime » de ma vie, de mes expériences, de mes émotions.


Si je suis réellement surdouée, mais flûte que le mot me dérange, je tiens à vous dire que c’est dur. Si j’avais eu le choix, j’aurais choisi d’être comme les autres. De pouvoir m’amuser facilement, de dormir la nuit, d’avoir des millions d’amis, de ne pas constamment me remettre sérieusement en question et surtout, surtout, de ne pas avoir à me taper les émotions des autres en permanence. Mais la vie étant ce qu’elle est, quand on a pigé dans le sac à costume pour moi, c’est ce qui en est sorti. Malgré tout, quand je fais la liste de mes valeurs, intérêts, aptitudes, je suis maintenant capable d’en venir à la conclusion que je suis un bon humain. Une bonne personne. Une personne empathique, trop mais j’y travaille, et qui se soucie réellement des gens. Je comprends maintenant qu’être aimé de tous n’est non seulement pas possible, mais pas non plus souhaitable. Heureusement, et ça a peut-être l’air vantard mais j’assume, je suis cute. Quand je me regarde dans le miroir, je me dis « au moins, j’aime ce que je vois, sauf que je me ferais bien encore percer là, là et là… ».

mercredi 20 septembre 2017

Défi sans sucre jour 3 - émergence partielle

Aujourd’hui, j’aime la vie. Je repense à hier et je me revois, en quasi-détresse. C’est irréaliste comme sensation. Même si le défi à proprement parler demandait de couper quelques sources de sucre, je les ai presque toute coupées, par choix. J’ai gardé les bananes. J’aime les bananes.

Donc aujourd’hui, je n’ai pas « souffert ». À 16 h, mon cerveau s’est mis à « off », cependant. Et je suis partie à la maison. Ma patience était partiellement revenue. Par contre, il faudra que je trouve des alternatives de recettes pour éviter de tomber en dépression alimentaire.

J’en suis à la troisième journée complète. Je suis à la fois contente de ne pas me sentir aussi moche qu’hier, c’est sans doute signe que le bas fond était au jour 2, et déçue de ne pas déjà être « hop la vie ». Cependant, j’ai dû aller me « sucrer » après le dîner, à grands coups de brossage de dents, parce que je faisais une fixation sur du « dessert ». Ça n’aurait pas eu besoin d’être très sucré, mais « farineux ». J’avais envie de farine. J’ai pris mon café « sec », pas d’accompagnement. C’est là que la notion d’habitude embarque. J’aimais manger un « dessert » à 13 h 30, avec mon café d’après-midi.

Côté goût, je ne trouve pas particulièrement que les aliments manquent de saveur. Je mets des bananes dans mes muffins et mes smoothies, mais tout de même, il fut une époque où je mettais du sirop d’érable ou du miel. Et du chocolat. Je ne prévois pas couper les bananes. Il y a des limites quand même. Je peux vivre sans date, mais jamais sans bananes. Que serait la vie sans mouches à fruit?


Bon, je n’ai pas récupéré mon cerveau alors ça suffit. Au jour 4 tout le monde.

mardi 19 septembre 2017

Défi sans sucre jour 2 : Tuez-moi s’il-vous-plaît

Bon. Si ce n’est d’un énorme mal de tête, d’un état de confusion profond, d’impossibilité de me concentrer et d’irritabilité extrême, ça va bien. Je n’ai pas particulièrement envie de sucre. Je me sens simplement comme après mes voyages en Chine… Extra décalage.

J’ai cédé après le souper avec un yogourt nature avec bananes, pacanes et graines de chanvre. Constat, je n’aurais pas dû parce que je ne feel pas. Je me sens bourrée comme jamais.

Ce qui est certain, c’est que je me sens sincèrement en sevrage. Je suis « accro » au café (et très assumée) et chaque sevrage « obligatoire » n’a pas fait aussi mal que celui-là. Je n’ai pas envie de manger des affaires en particulier et la nourriture des autres ne m’intéresse pas. Je feel juste comme d’la marde.

Aujourd’hui, j’ai ouvertement parlé de ma démarche à des gens de façon aléatoire et les opinions sont intéressantes. Le fait que je veuille délaisser le sucre mais sans vouloir maigrir crée de la confusion. Rend les gens perplexes. Pourquoi se faire mal si ce n’est pas pour maigrir? Parce que le but est le même. On se torture comme ça afin de se sentir mieux. Certains changent leur alimentation pour maigrir et ultimement pour se sentir mieux. Moi je veux être mieux.

J’ai habituellement un vocabulaire varié mais ce soir, ce n’est clairement pas le cas. Mon cerveau se concentre sur les fonctions que lui juge vitales, c’est-à-dire de me rappeler en temps réel que mon corps est en réaction contre moi.

Avec un peu de chance, mon cerveau sera capable de recommencer à fonctionner dans les prochains jours. Une amie médecin m’a dit « le sevrage du sucre est presqu’aussi intense que le sevrage d’héroïne. C’est intense le sucre ». Nah?


À suivre.

lundi 18 septembre 2017

La ségrégation des minces

Scandale, ô catastrophe. Je viens de décider que j’allais couper le sucre. Couper, dans le genre de « sortir le sucre de ma vie ». Ouais ouais. Genre. Est-ce que je suis grosse? Non. Ronde? Non plus. Enveloppée? Même pas. Rien ‘toute. On me qualifie régulièrement de « maigre » même. Bon, le terme m’écoeure un peu parce que j’ai quand même un petit bid et des bonnes cuisses mais que voulez-vous. Je porte du X-Small et mon IMC est à la limite inférieure de la catégorie « poids santé », pour ce que ça vaut.

Ouais. Pour ce que ça vaut. Parce que dans les faits, je mange plutôt moyennement bien. Je n’ose pas trop dire « mal » parce que c’est raide comme terme, et que j’ai au moins conscience de ce que je mange, et que je cuisine quelques fois par semaine, mais j’ai déjà mieux mangé. Et moins bu d’alcool. 2017 a été prenante jusqu’à maintenant. Séparation, changement de type d’emploi, déménagement, garde partagée… De grosses étapes. Et beaucoup beaucoup d’anxiété. Crise après crise après crise. Donc j’ai un peu délaissé le petit côté cuistot que je chérissais tant et je me suis doucement mais sûrement dirigée vers les plats cuisinés… l’inverse du gros bon sens.

Je suis aussi retournée un peu dans le vice de l’alcool. Rien d’extrême mais assez. Assez pour être trop. Dit-elle en quémandant une autre bière…

Bon, toujours est-il que grâce ou à cause d’une « amie » connaissance que je trouve vraiment gentille mais qui s’est éloignée avant de pouvoir entrer vraiment dans ma vie, j’ai vu passer quelque chose sur Facebook qui s’appelle le Défi 21 jours sans sucre et ça m’a immédiatement accroché l’œil. Depuis longtemps, j’entends et je crois dur comme fer que le sucre est bien plus mauvais que le gras. Je sais que le sucre est une substance qui crée une grande dépendance et dont les effets sont moches.

Je vous entends déjà me dire que j’exagère et que tout est rendu mauvais et dangereux, et qu’il faut bien mourir de quelque chose. Vous avez raison. Sauf que c’est de la marde comme argument. Le sucre est un vil pervers. J’ai découvert depuis peu que le dessert me donne mal au ventre. Ben oui. Et que les bonbons aussi. Et ensuite j’ai regardé des vidéos et lu des articles qui disaient que le sucre nous rendait fatigué et cerné… Il n’en fallait pas plus pour que je décide d’essayer.

Un jour, on m’a dit qu’il fallait 21 jours pour créer ou se débarrasser d’une habitude. J’ai aussi entendu que le sevrage du sucre était horrrrrible. Que le sucre crée une dépendance plus grande que la cocaïne. Or, je suis capable, n’est-ce pas? Certes. Mais j’ai peur. Peur des gens, peur de moi, peur de la nourriture, peur de tout. J’aime les Mini-Wheat, la bière, le chocolat, le sirop d’érable, les chips… Toutes des substances pleines de sucre et d’amidon. J’ai peur de me faire juger, comme on juge les végétariens, les anti-glutens, les allergiques aux noix… Mais au fond, j’ai juste peur de ne pas être capable. Peur de réaliser que je me fais dominer par la nourriture.

L’argument des kilos qui s’en vont n’a pas de poids à mes yeux. Si je maigris, mes beaux vêtements ne m’iront plus. Par contre, l’attrait d’une plus belle peau, d’un sentiment de repos au lever, d’une belle énergie, ça ça a du poids. Et j’ai aussi lu que les effets bénéfiques se font sentir après 6 à 8 semaines seulement. Donc ce doit être un défi à long terme.

Pour en revenir au jugement, on m’a dit aujourd’hui que j’avais pas besoin de ça. Gratis. Straight de même « pourquoi tu couperais le sucre, t’as pas besoin de ça, toi ». Le lien à ma sacro-sainte minceur était sous entendu, v’voyez. Dans la vie d’une femme, le bonheur absolu réside à pouvoir manger de la poutine, des chips, du chocolat, de la pizza, boire de la bière, ne jamais s’entraîner mais tout de même rester mince. American Dream, mais version ti-peuple québécois.

Cet été, j’ai rien foutu, à 2-3 petites marches lentes près. Rien faite. Niet. Une pâte molle, mais pas trop molle quand même. « Wow, dans le fond c’est vrai que ça sert à rien de faire attention et de se bouger les fesses, j’ai même pas pris une livre ». Ouch. Essoufflée pour courir à mon auto quand il pleut, palpitations à n’en plus finir, sommeil non réparateur, anxiété, spm… Tsé, je veux ben croire que j’ai un petit cul, mais je pourrais tu aussi être bien dans mon corps? Pas de misère à croire qu’il y a des gens plus enveloppés qui se sentent mieux que moi.

Toujours est-il que lundi, je me crinque. J’ai fait comme bien des femmes avant un régime, je prends de la bière en me bourrant de chips, parce que dès lundi, j’ai l’intention de ne pas me chouchouter. Out les dessert, la bière, le sucre dans les recettes, les aliments préparés qui en contiennent. Je vais commencer doucement avec les choses évidentes au goût sucré, genre mes belles Mini-Wheat, les trop fréquents capuccinos glacés, les gelatos, le stout cake, la réglisse, la root beer, les pains burgers briochés, la bière... Et tant qu’à vouloir enlever l’attrait du sucre, aussi bien couper le faux aussi. Les menthes, la gomme…

Avant de « raccrocher », parce qu’on est maintenant lundi le 18 et que ce texte n’est pas encore complet… je vais terminer ce témoignage touchant en disant à tous ceux qui me trouvent chanceuse d’être mince que j’ai déjà souffert de troubles alimentaires. Rien qui aurait pu me tuer, mais j’ai arrêté de manger presque complètement pendant quatre mois quand j’étais ado. J’ai perdu une quarantaine de livres à ce moment. Outre perdre mes cheveux, arrêter mes règles et ruiner ma santé mentale et ma relation avec la nourriture, je n’ai pas vraiment eu de séquelles. Maintenant que je n’ai plus cette peur phobique d’engraisser et que je ne mange plus mes émotions, après plus de 20 ans de travail acharné sur ma personne, j’ai envie de faire l’expérience scientifique de l’arrêt du sucre. Juste pour voir ce que ça fait. Il y a peu de gens qui peuvent revenir nous raconter c’est comment la mort, mais vivre sans sucre pendant un moment, ça se fait.


À tout de suite!

dimanche 23 juillet 2017

Automutilation…

Le terme fait peur, n’est-ce pas. On voit tout de suite une adolescente perturbée, qui s’est faite agresser par un proche et qui se coupe les avant-bras avec des lames de rasoir. Pourtant, quoique réelle, cette image de l’automutilation n’est certainement pas la plus réaliste et répandue.

Je pourrais vous garrocher des belles définitions selon des dictionnaires qui se la pètent mais je vais tout à fait éviter ça et vous raconter MON automutilation. La mienne à moi. Celle qui me hante, qui me supporte, qui me tient compagnie, qui me rassure, qui me donne des émotions, qui me fait regretter, qui change le regard des autres, qui fait partie de moi.

J’ai admis un trouble anxieux en janvier 2016. Entre deux crises d’hystérie, je me suis dit que j’avais besoin d’aide. Puis j’ai agi. On en reparlera un jour. Ou pas. Puis le temps a passé, je me suis adaptée au traitement. Une fois le TAG (trouble anxieux généralisé) sous contrôle, les bibittes plus profondes se sont sorti le nez. Elles avaient toujours été là, mais on ne les voyait pas. J’avais toujours pensé que je me détruisais les doigts parce que les petites peaux me dérangeaient. « Legit ». Puis que je m’arrachais la peau du cou et du dos parce que j’avais des boutons. Possible. Puis que je me grattais le fond de tête parce que ça piquait. Tsé. Au pire, c’était des mauvaises habitudes.

Un jour, alors que je n’avais plus cette nausée anxieuse à surveiller, j’ai réalisé que mes « boutons », mes « accrocs », ils n’étaient pas dérangeants. En fait, ils n’existaient pas. Jusqu’à ce que je sois inconfortable. Nerveuse. Triste. Contente. Stressée. Fâchée. Excitée. Déçue. Là, je me mettais à chercher le trouble. Pis à gosser, gosser, gosser jusqu’à ce que ça fasse mal.

Douleur physique. Sang. Cicatrice. Quelque chose de bien plus concret que l’émotion déclencheuse. Imaginez en période de séparation et de changement de travail… Mon pauvre cou, il est marqué à vie. Et je continue. N’allez pas croire qu’il suffit de se séparer et de changer de travail pour que ça se règle. Il restera toujours les chicanes, les problèmes financiers, les enfants qui déboulent les marches, les clients en maudit, les crises économiques, les enragés du volant, les perce-oreilles, les virus d’enfant, les attentats terroristes, les dégâts d’eau, les crevaisons, les tremblements de terre… Toutes les raisons sont bonnes pour se faire mal. En fait, la douleur n’est qu’un « bonus ». Je gratte et j’arrache comme si l’émotion dérangeante était l’accroc en question et que ça passerait si je l’enlevais.

Le fait est que même si c’est fait dans le but de me rassurer, de me sentir là, de « ressentir », de me réconforter… ben ça dure pas. Ça dure les quelques secondes, parfois minutes, requises à la destruction de la zone. Ensuite, il faut trouver un autre endroit. Ce n’était peut-être pas le bon cuticule pour traiter contre les chats qui vomissent. Et ça finit par trois pansements par main, le divan blanc taché de sang et des beaux bobos partout…

Peut-être vous dites-vous que ce n’est pas vraiment de l’automutilation, que tout le monde fait ça, à différents degrés. Certes, vous avez sans doute raison. Sauf que moi, j’en suis maintenant consciente, et maintenant que je sais que je le fais, dans quel but, et que je suis « incapable » de le contrôler, je considère que c’est un problème. Je consulte, si vous vouliez demander. Peut-être aussi vous dites-vous que je manque de volonté. Et peut-être même que vous avez raison. Ou pas. Mais le fait d’en parler, ça m’aide. Les gens qui m’aiment et qui me font attention sont compréhensifs. Et je pense que je le fais de moins en moins. Peut-être que peindre et écrire seront mon exutoire. Peut-être qu’un jour je pourrai n’avoir mal à aucun doit, n’avoir aucune plaie fraîche… Ou pas. D’ici là, bon retour sur mon blogue, et je souhaite de tout cœur ne pas attendre un an avant d’y revenir.